Plusieurs mois auparavant
La traversée en bateau leur parut longue et courte à la fois. Ils étaient partis contre leur volonté. Leur père ne leur avait pas laissé le choix.
Maître Kaldi, leur Mentor, avec sa sagesse habituelle, avait su leur faire entrevoir l'intérêt de ce voyage en leur parlant de la richesse des connaissances qu'ils allaient pouvoir acquérir au Manoir Venim, au sein d'Arador Dayn. C'était des Ihrfihn, des Telvanni, et en tant que tels ils se devaient d'être fidèles à leurs origines.
Est-ce que ces raisons étaient suffisantes pour justifier de laisser derrière eux tout le confort et la liberté de mouvements dont ils avaient pu bénéficier toute leur jeune vie durant ? Certainement. Mais pour l'instant ils en voulaient à leur père. Ils avaient l'impression qu'il avait tout simplement voulu se débarrasser d'eux afin de servir ses propres intérêts. Il avait ainsi fait d'une pierre deux coups.
Depuis leur enfance, Maëfarayn avait toujours été bien plus positive et optimiste que son jumeau, Cyian, gardant toujours son doux sourire sur ses lèvres, quoi qu'il arrive. Cependant, cette fois-ci, elle avait, comme lui, perdu l'éclat lunaire de ses yeux, et son visage était presque inexpressif. Ou en tout cas ceux qui ne la connaissaient pas aussi bien que son frère n'auraient rien pu être capables de lire sur son visage.
Ils n'avaient pas échangé un seul mot de tout le voyage. En apparence. Seulement en apparence. En fait, il serait plus juste de dire qu'aucun son n'était sorti de leurs bouches. Par contre, leurs mains n'avaient pas cessé de bouger, parfois lentement, parfois plus rapidement, et les jumeaux étaient restés l'un près de l'autre, leur regard plongé dans celui de l'autre.
Lorsque le bateau arriva enfin au port du Guet de Davon, ils restèrent un long moment sur le quai, enlacés. Leurs yeux ne se détachaient pas d'une même et seule direction : celle de Seydãrã. Ils se demandaient quand ils pourraient rentrer chez eux.
Cyian fit enfin un léger geste de la main, embrassa tendrement Maëfarayn et lui dit :- Osuhn havadyir, yi Daelhe'ag-Daeseh.
1Elle lui rendit son baiser avec fougue, son regard s'éclairant à nouveau l'espace de quelques instants. Puis, ils se dirigèrent vers les écuries.[HRP]
1 Osuhn havadyir, yi Daelhe'ag-Daeseh = Nous devons partir, ma Sœur-Aimée.
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