Un carnet de cuir relié a été tout récemment ajouté aux rayonnages de la bibliothèque. Pas d'annotations, ni de préface pour en indiquer plus clairement la teneur, il semble s'agir d'un recueil de documents d'auteurs diverses, portant tous sur un même sujet cependant : un mystérieux mécanisme dwemer.
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Rapport de mission
par Thalen Serano des Mora, Ancien de la Maison Arador Dayn
Objet : visite à Arvs-Drelen auprès de Revus Demnevanni des Telvanni concernant un mécanisme dwemer inconnu.
Tirdas, 23ème jour de Plantaisons, 2E582.
Après mon arrivée à Gnisis, J'ai pris quelques heures pour me présenter au seigneur Ramoran, suzerain des lieux, qui en plus était actuellement dans son manoir local. Nous avons échangé les banalités diplomatiques d'usage et j'ai pu avoir un laissez-passer pour circuler dans la région.
J'avais lors de mes étapes à Vivec, Balmora et Ald'ruhn, rassemblé quelques informations à propos de ce mage Telvanni. Il habite depuis longtemps seul dans sa tour, isolé en territoire redoran, éloigné des autres Telvanni qu'il ne considère pas favorablement. Il n'a aucun goût pour les intrigues politiques et de pouvoir habituelles de sa Maison. Les démonstrations de pouvoir ne l'affectent pas... D'autant que ses connaissances magiques en font un sorcier puissant.
Il est décrit comme très excentrique et aussi très lunatique, qui n'arrive à se concentrer durablement que sur ce qui concerne les dwemers. On ne lui connaît pas de malversation ni de dette et il n'apporte pas d'importance à la richesse pécuniaire. Sa famille est éloignée et il ne s'en soucie pas. Sa puissance magique l'immunise contre toute tentative de magie d'illusion ou d'altération. Il est malavisé de tenter de le séduire en lui donnant des objets dwemers, étant donné qu'il les a quasiment déjà tous examinés.
Il n'a pas d'attirance particulière pour la bonne chair, ni masculine ni féminine, ni même Khajiit ou argonienne... mais il a un cuisinier personnel impérial qui lui est très précieux et semble passer du temps et de ressources à commander des produits alimentaires de Cyrodiil.
J'ai pu, au quartier étranger, faire quelques emplettes spéciales, entre autre du flinn impérial 18 ans d'âge, très boisé, relativement rare, d'une distillerie réputée (note de frais en annexe). Par ailleurs, ayant compulsé quelques notes d'alchimie de Maëfarayn dans la bibliothèque avant de partir, j'ai pu sur la route récupérer des plumes de braillard et des feuilles de buisson roux. Un contact à Balmora, alchimiste expérimenté, en a tiré une essence quasiment inodore, incolore et insipide. Une petite manipulation a permis d'en introduire quelque quantité dans le flinn sans décacheter la bouteille.
Je me suis présenté à sa porte, en tant que messager de Ralen Venim. Son portier cuisinier (qui est effectivement un impérial, bien caché sous des frusques nordiques et une teinture blonde du plus bel effet) m'a conduit à lui sans trop de discussion. Maître Demnevanni a semblé se souvenir de la Maison et de feu Sieran Venim dont il m'a demandé des nouvelles, mélangeant apparemment le père et le fils.
Nous avons diplomatiquement échangé quelques banalités, puis il s'est intéressé à mes voyages récents, entre autres la frontière ouest de Morrowind et l'est de Brodeciel, qu'il n'a pas pu explorer depuis longtemps en raison des troubles. J'ai pu orienter la discussion vers l'est de Cyrodiil qui l'a peu intéressé, peut-être en l'absence de ruine dwemer dans la région... En plaisantant sur la contrebande qui persiste même en pleine guerre des Alliances, je lui ai montré le flinn, pour lequel son regard s'est allumé. Je l'ai présenté comme un cadeau pour Maître Ralen, puis une confidence sur l'existence d'une deuxième bouteille nous a permis d'ouvrir la "première".
Chercher de quoi l'ouvrir dans mon sac (et éviter le regard inquisiteur du cuisinier) m'a permis de me saisir à usage personnel d'un petit antidote à l'essence de plume et buisson.
Après dégustation du flinn, il est devenu légèrement plus volubile et moins méfiant. J'ai pu progressivement amener la discussion sur les mécanismes d'ouverture et de fermeture originaux des ingénieurs dwemers. Il m'en a décrit quelques uns mais de fonctionnement purement mécanique. Le sentant à point, je lui ai présenté le plan de celui de l'Arador Dayn.
Il ne connaissait pas d'exemplaire de ce type de mécanisme jusqu'alors, et donc s'est littéralement plongé dans les notes fournies (il a notamment complimenté la qualité de ces notes, "
surtout pour un redoran", je cite). Il a d'ailleurs commencé par approuver la liste des ingrédients supposés pour l'ouverture du mécanisme.
Les quatre orifices du mécanismes ne semblent pas destinés, au vu des inscriptions portées dessus, à recueillir chacun un des ingrédients. Les Dwemer étaient des mécaniciens et ingénieurs, et non des alchimistes forcenés. Seul importe l'orifice central supérieur, les autres étant soit des leurres, soit des espaces pour introduire les instruments nécessaires à l'ouverture. En outre, les Dwemer avaient un grand attrait pour la magie des âmes qu'ils accommodaient, l'expression est de lui, à toutes les sauces.
Il a exploré de nombreuses pistes incluant les quatre éléments, y compris des pistes très symboliques qui m'ont échappé car le symbolisme chez les dwemer m'est assez étranger.
Après quelques heures, et le trépas définitif de mon flin si précieux ainsi que de trois plats différents (tous de recette impériale), il n'a pu retenir qu'une possibilité incluant les quatre éléments connus. J'ai pris des notes sous sa dictée, que je vous inclus sous enveloppe imperméable et cachetée ci-joint.
Citer :
La clé du mécanisme est bien le Petatus Vaporigneus, dont l'une des propriétés, comme son nom l'indique, est de produire un gaz particulier. Les autres ingrédients sont des excipients nécessaires à l'équilibre de la "clé" durant la mobilisation du mécanisme, celui-ci étant instable. Le but apparemment de ce type de serrure est de forcer celui qui veut l'actionner à prendre du temps pour y parvenir, imposant une ouverture programmée et préparée, et interdisant toute activation clandestine.
Le mécanisme, donc, réagira à la présence du gaz dégagé par le Petatus Vaporigneus, mais sous certaines conditions. C'est pourquoi celui-ci doit d'abord être placé en milieu clos, puis chauffé progressivement jusqu'à une certaine température. Celle-ci se définira par l'entrée en résonance d'une pierre d'âme placée au contact du gaz. Le phénomène est d'autant plus facile à observer que la pierre est grande et que l'âme inclue est importante. (NDLR : Maître Demnevanni propose une âme de Daedroth, au moins, voire de Sainte Dorée).
Dans ce cas, pourquoi la cire de Dreugh, la racine de trama et la résine de Shalk ? En raison de l'instabilité du gaz obtenu.
D'abord, on doit, en mélangeant le gaz avec de l'huile purifiée de racine de trama portée à même température, qui va par son acidité le stabiliser en phase liquide, ce qui rend le gaz plus maniable (mais attention, je soupçonne ce mélange d'être un fluide agité qui voudra s'échapper du réceptacle), et permet un meilleur contact dudit gaz avec les parois du mécanisme.
Ensuite, le mélange cire et résine permet de créer un emplâtre qui va fermer le réceptacle central du mécanisme tout en n'interagissant pas alchimiquement avec le gaz liquéfié donc en n'altérant pas ses propriétés. Ceci laisse le temps au mécanisme de réagir au gaz et de se déverrouiller. En l'absence de cette fermeture close du réceptacle central, le gaz liquéfié se vaporise trop vite au vu de la taille du réceptacle et ne déclenche pas le mécanisme.
Le principal est là, des discussions annexes sur le type de matières utilisées pour réagir au gaz du champignon, ainsi que des réflexions sur la symbolique du nombre de crans des roues dentées des mécanismes dwemer sont aussi dans l'enveloppe.
Une journée entière, quasiment, avait passé et le sommeil, ainsi que le poids du flin sur les paupières de mon hôte, se faisaient sentir. Il a rapidement écrit un petit mot pour Maître Ralen (c'est la petite enveloppe cachetée dans le paquet en toile cirée) et m'a fait promettre de lui donner le résultat de nos tentatives d'ouverture. Je me suis empressé de prendre congé d'autant que la bouteille de flinn était vide depuis longtemps et je soupçonnais ses effets "spéciaux" de s'atténuer rapidement. L'empressement était aussi de son côté, je ne sais si c'est par fatigue ou parce qu'il était vraiment désireux de nous voir débuter le plus vite possible...
J'ai profité du laissez-passer du seigneur Ramoran pour me faire une place confortable dans un navire rapide qui descendait le long de la côte de la mélancolie, le seigneur du lieu ainsi que des informations glanées entre Ald'ruhn et Gnisis m'ayant rassuré sur les rumeurs de piraterie nordique sur les bords de la Mer Intérieure. Le caboteur n'était certes pas très rapide mais confortable, j'ai pu y embarquer les guars, et il m'a déposé à Coeurébène après une navigation sans histoire. La traversée des Eboulis a été facilitée car j'ai rejoint une caravane de marchands qui descendaient vers Deshaan, ce qui m'a permis de revenir aussi vite et de vous déposer mon rapport.
Au service de l'Arador Dayn et par la grâce des Trois,
Thalen Serano